Retirer de l’argent de votre société via l’octroi de dividendes

Un dividende, c’est la rémunération accordée à l’actionnaire pour ses « apports » en argent ou en nature.

Retirer de l’argent de votre société via l’octroi de dividendes

1.  Notions

1.1.                   Qu’est-ce qu’un « dividende » ?

Un dividende, c’est la rémunération accordée à l’actionnaire pour ses « apports » en argent ou en nature. Cette rémunération est prélevée sur une partie du bénéfice que la société a réalisé et qu’elle décide de distribuer entre ses actionnaires. En fait, un dividende est le rendement que vous rapporte l’argent que vous avez apporté à la société (ou celui qu’ont apporté ceux à qui vous avez racheté les actions).

Quand un dividende est-il distribué ? En général, un dividende est attribué par l’assemblée annuelle, c’est-à-dire « l’assemblée générale des actionnaires » à qu’il revient chaque année (quelques mois après la clôture de l’exercice comptable) de décider de l’affectation à donner au bénéfice de la société (art. 5:96 et 7:147 CSA). L’assemblée générale peut décider p.ex. de maintenir le bénéfice au sein de la société (c.-à-d. de l’incorporer aux réserves), de le distribuer aux actionnaires (distribution d’un dividende), de le distribuer aux dirigeants de la société sous la forme d’un tantième, etc. Bien évidemment, l’assemblée générale peut décider de combiner ces diverses formes d’affectation du bénéfice. Une société n'est en aucun cas tenue de distribuer des dividendes. Les actionnaires peuvent parfaitement décider chaque année de mettre tous les bénéfices en réserve.

Un dividende peut également être attribué par une assemblée générale qui se tient à un autre moment que l'assemblée annuelle, appelée « assemblée générale extraordinaire ». Le dividende attribué par une assemblée générale extraordinaire est appelé « dividende intérimaire ».

Relevons au passage qu’une assemblée générale des actionnaires ne doit normalement pas se tenir devant notaire. Une telle assemblée générale, vous pouvez (façon de parler) la tenir dans votre salle à manger. Très souvent, d’ailleurs, elle ne se réunit pas physiquement, mais se déroule uniquement « sur papier ». Autrement dit, il n’est établi qu’un « procès-verbal de l’assemblée générale » que signe ensuite chaque actionnaire.

Enfin, nous signalons que lorsque les statuts le prévoient, et sous certaines conditions, l’organe d’administration peut également distribuer des dividendes, appelés « acomptes sur dividende », mais uniquement sur le bénéfice de l’exercice en cours et du précédent, si les comptes annuels de ce dernier n’ont pas encore été approuvés, éventuellement augmenté du bénéfice reporté et diminué de la perte reportée.

Quelles sociétés peuvent distribuer un dividende ? En principe, toute société peut distribuer un dividende et ce n’est donc nullement chose réservée aux grandes sociétés cotées en bourse. Cela pourrait p.ex. aussi se voir dans une société n’ayant qu’un seul actionnaire. La seule différence résidera dans l’ampleur de l’assemblée générale des actionnaires. Si vous êtes l’actionnaire unique, vous en composez donc, à vous tout seul, toute l’assemblée générale. Ceci dit, cela ne change en soi absolument rien au fait que votre société peut elle aussi distribuer un dividende.

Quand est-il possible de distribuer un dividende ? Dès lors que la distribution d’un dividende est une affectation du bénéfice, elle ne peut bien évidemment intervenir que si la société a réalisé du bénéfice. En principe, une société déficitaire ne peut donc pas distribuer de dividende.

Toutefois, la société ne doit pas nécessairement retirer le bénéfice nécessaire à la distribution d’un dividende au cours du même exercice que celui où elle désire distribuer ce dividende. Autrement dit, une société peut parfaitement distribuer le bénéfice réalisé lors d’un exercice comptable précédent sous la forme d’un dividende. Une société qui a fait une perte peut donc en principe distribuer elle aussi un dividende si elle a réalisé du bénéfice au cours d’un de ses exercices comptables précédents et si ce bénéfice a été maintenu en son sein (a été « mis en réserves »).

À qui est-il possible de distribuer un dividende ? Une société ne peut distribuer un dividende qu’à ses actionnaires (Com. IR 18/16). En effet, un dividende est la rémunération de l’argent que les actionnaires ont utilisé pour constituer la société ou pour en acquérir les actions.

Un dirigeant (gérant/administrateur) qui ne possède pas d’actions de sa société ne peut donc pas en retirer de dividende.

En principe, une société doit aussi toujours distribuer un dividende à tous ses actionnaires. Autrement dit, il n’est normalement pas possible de distribuer un dividende à certains actionnaires seulement et à d’autres pas.

1.2.                   Comment un dividende est-il distribué ?

Une simple décision suffit. C’est, nous l’avons dit, l’assemblée générale des actionnaires qui décide de distribuer un dividende. En soi, la décision de distribuer un dividende et le « procès-verbal » de l’assemblée générale qui constate cette décision sont dès lors suffisants.

Il n’est donc pas requis, en plus, que cette décision soit approuvée p.ex. par un notaire.

Retenue du précompte mobilier. Tout comme quand elle verse des intérêts, une société doit retenir un précompte mobilier lorsqu’elle distribue un dividende et verser ce précompte au receveur des contributions compétent (art. 261, 1° CIR 92). L’actionnaire, quant à lui, perçoit donc un dividende net.

Paiement. Pour ce qui est du paiement du dividende, vous avez le choix : soit vous le faites effectivement verser à votre compte privé, soit vous le faites simplement comptabiliser au crédit de votre compte courant. Pour ce qui est du caractère imposable du dividende, le mode de paiement du dividende ne fait pas la moindre différence (Com. IR 18/16). En d’autres termes, les dividendes que vous n’avez pas encore effectivement perçus, mais qui ont été comptabilisés au crédit de votre compte courant, sont censés vous avoir été effectivement attribués et sont donc imposables.

1.3.                   Quel montant est-il possible de distribuer sous la forme d’un dividende ?

Principe. Dès lors qu’une société ne peut distribuer de dividende que si elle a fait du bénéfice, le dividende distribuable au maximum équivaut au total du bénéfice réalisé. Autrement dit, une société ne peut pas distribuer un dividende supérieur au bénéfice qu’elle a réalisé au cours de l’exercice écoulé ou des exercices antérieurs (art. 5:142 et 7:212 CSA). De plus, la distribution d’un dividende est soumise au test de bilan et, pour les SRL, au test de liquidité.

Test de l’actif net ou test du bilan. Le test de l’actif net, ou test du bilan, implique qu’aucun dividende ne peut être distribué si l’actif net de la société (= l’actif moins les dettes) est négatif, ou si le versement le ferait passer, pour une SA, sous le montant du montant du capital libéré augmenté des réserves qui ne peuvent être distribuées conformément à la loi ou aux statuts (art. 7:212 CSA) ou, pour les SRL, sous celui des fonds propres indisponibles (art. 5:142 CSA). Le test du bilan doit être effectué par l’assemblée générale.

Test de liquidité. Le test de liquidité signifie qu’une SRL ne peut verser un dividende que si elle sera encore en mesure, selon l’évolution raisonnablement attendue, de payer les dettes exigibles et payables pendant les 12 mois qui suivent la distribution (art. 5:143 CSA). Ce test doit être effectué par les administrateurs.

2.  Conséquences pour votre société

2.1.                   Votre société peut-elle déduire les dividendes qu’elle distribue ?

Non. En principe, une société ne peut jamais déduire à titre de frais professionnels les dividendes qu’elle distribue (art. 185, §1 CIR 92). En eux-mêmes, des dividendes ne constituent pas des « frais » pour une société ; au contraire, ils sont pour elle un moyen d’affecter son bénéfice, d’en répartir une partie entre ses actionnaires.

En d’autres termes, les bénéfices ainsi répartis sont au préalable toujours imposés, sans quoi toute société distribuerait bien sûr tous ses bénéfices de façon à ne jamais payer d’impôt.

Une « demi-exception ». Ainsi que nous l’avons indiqué ci-avant, des dividendes peuvent provenir du bénéfice de l’exercice comptable même, mais aussi du bénéfice d’exercices comptables antérieurs. Dans ce dernier cas, le bénéfice (qui n’avait alors pas été distribué, mais mis en réserve) a bien sûr déjà été imposé.

Dans ce cas-là aussi, les dividendes ne seront néanmoins pas déductibles ; cependant, la double imposition de ces bénéfices antérieurs sera évitée par une diminution à due concurrence des « réserves taxées » dans la déclaration à l’impôt des sociétés.

Exemple n° 1

Votre société a réalisé un bénéfice de 10 000 € et vous en distribue p.ex. un dividende de 3 000 €.

Le bénéfice subsistant de 7 000 € est laissé dans la société et donc ajouté aux « réserves taxées ». Le résultat imposable de la société se présente donc comme suit :

 

Augmentation des réserves taxées

 7 000 €

Dividende distribué

 3 000 €

Total imposable

 10 000 €

 

 

 

 

Exemple n° 2

Nous voici un an plus tard et votre société n’a réalisé ni bénéfice ni perte, son résultat est donc égal à zéro (pour faciliter les choses). Elle décide néanmoins de distribuer un dividende de 2 000 € provenant du bénéfice de son exercice comptable antérieur. Son résultat imposable se présente, cette année-là, comme suit :

 

Diminution des réserves taxées

 – 2 000 €

Dividende distribué

 2 000 €

Total imposable

 0 €

 

 

 

 

Dans ce cas-là aussi, le dividende distribué n’est donc pas déductible : le résultat de la société demeure en effet égal à zéro. Néanmoins, votre société n’a plus d’impôt à payer sur le dividende qu’elle distribue pour la simple raison qu’elle l’a déjà payé l’année précédente (il s’agit de l’impôt qu’elle a payé sur son bénéfice réservé de 7 000 €).

2.2.                   Comment votre société est-elle imposée sur un dividende qu’elle distribue ?

Quand ? En principe, un dividende distribué est imposable pour l’exercice comptable auquel il se rattache, même si l’assemblée générale qui a pris la décision de le distribuer a lieu l’année suivante.

Exemple

L’assemblée générale de mai 2025, qui doit approuver les comptes annuels de l’exercice comptable 2024, a décidé de distribuer un dividende. La société est alors imposée sur ce dividende pour l’exercice comptable 2024, bien que l’assemblée générale n’ait décidé de distribuer ce dividende qu’en 2025.

Taux. Un dividende est imposé comme le bénéfice imposable « ordinaire » de la société : soit au taux ordinaire de l’impôt des sociétés de 25 %, soit au taux réduit de 20 % applicable sur la première tranche de 100 000 € de bénéfice imposable (art. 215 CIR 92).

2.3.                   Votre société doit-elle retenir un précompte mobilier sur un dividende ?

Oui. Lorsqu’elle distribue un dividende, votre société doit en principe retenir le précompte mobilier (art. 261, al. 1, 1° CIR 92). Elle doit le verser dans les 15 jours au receveur des contributions, en même temps qu’elle dépose une déclaration au précompte mobilier (art. 412 CIR 92).

Taux normal de 30 %. Le taux du précompte mobilier est en principe de 30 % (art. 269, §1, 1° CIR 92). Pour certains dividendes de petites sociétés, il existe toutefois un taux réduit, le taux « VVPRbis », ainsi qu’un précompte mobilier réduit sur la distribution de la réserve de liquidation.

VVPR-bis. Le précompte mobilier ne s’élève qu’à 15 % lorsque les conditions suivantes sont remplies (art. 269, §2 CIR 92) :

•         les dividendes proviennent d’actions ou parts nouvelles nominatives, acquises au moyen d’apports en numéraire, effectués à partir du 1er juillet 2013 et qui ne proviennent pas de réserves « réincorporées » de 2013 ou 2014 (voir plus loin) ;

•         les actions ou parts doivent être entièrement libérées au moment de l’émission, et elles ne peuvent être assorties d’aucun droit préférentiel en matière de participation au capital ou aux bénéfices ou en matière de répartition de l’avoir social (art. 269, §2, al. 12 CIR 92) ;

•         la société qui distribue ces dividendes doit être considérée comme une petite société au sens de l’art. 1:24, §1-6 CSA pour l’exercice d’imposition lié à la période imposable au cours de laquelle l’apport en capital a lieu (art. 269, §2, al. 1, 1° CIR 92) ;

•         le contribuable doit détenir la pleine propriété des actions ou parts de façon ininterrompue depuis l’apport en capital (art. 269, §2, al. 1, 6° CIR 92) ;

•         les dividendes sont alloués ou attribués lors de la répartition bénéficiaire du troisième exercice comptable suivant celui de l’apport ou les exercices suivants (art. 269, §2, al. 2, 2° CIR 92).

S’ils sont alloués ou attribués lors de la répartition bénéficiaire de l’exercice comptable de l’apport ou du premier exercice comptable suivant celui de l’apport, alors c’est le taux normal de 30 % qui est d’application. S’ils le sont lors de la répartition bénéficiaire du deuxième exercice comptable suivant celui de l’apport, le taux est fixé à 20 %, lorsque l'apport pour les actions a eu lieu au plus tard le 31 décembre 2025. Pour les apports à partir du 1er janvier 2026, le taux de 20 % sera supprimé, et le taux applicable aux dividendes issus de la répartition des bénéfices pour le deuxième exercice comptable suivant celui de l’apport sera de 30 %.

Le taux réduit du précompte mobilier ne s’applique pas aux dividendes attribués à du capital :

•         apporté dans la société via une augmentation de capital organisée après une réduction de capital ayant eu lieu à partir du 1er mai 2013, sauf dans la mesure où le montant de l’augmentation excède celui de la réduction (art. 269, §2, al. 8 CIR 92) ;

•         provenant d’une réduction de capital réalisée à partir du 1er mai 2013 dans une société liée ou associée à une personne au sens des articles 1:20 et 1:21 du CSA, et qui est investi par cette personne dans une augmentation de capital. La même disposition s’applique aux conjoints, parents et enfants mineurs non émancipés de cette personne (art. 269, §2, al. 9 CIR 92) ;

•         provenant de la distribution des réserves de liquidation d'une société liée avec un précompte mobilier de 5 %.

Une société ayant augmenté son capital dans le cadre de cette mesure, et qui réduit son capital par la suite, doit imputer prioritairement cette réduction sur le nouveau capital (art. 269, §2, al. 11 CIR 92).

Si les actions sont cédées, elles perdent leur droit au taux réduit, puisque l’une des conditions liées à ce régime préférentiel est que le contribuable conserve ses titres en pleine propriété de manière ininterrompue. Certains transferts du droit de propriété sont toutefois considérés comme n’ayant pas eu lieu.

Il s’agit :

•         du transfert des actions ou parts, en ligne directe ou entre conjoints, du fait d’une succession ou d’une donation en pleine propriété (art. 269, §2, al. 4 CIR 92) ;

•         du transfert des actions ou parts, en ligne directe ou entre conjoints, avec division de la pleine propriété en nue-propriété et usufruit, au profit de l’héritier et du conjoint survivant, si cette transmission résulte d’une succession dévolue légalement ou d’une manière conforme à la dévolution légale, ou d’un partage d’ascendant ne portant pas atteinte à l’usufruit du conjoint légal survivant (art. 269, §2, al. 5 CIR 92) ;

•         de l’acquisition ou la cession d’actions ou parts dans le cadre de fusions, de scissions ou d’opérations assimilées réalisées en neutralité d’impôts (art. 269, §2, al. 6 CIR 92).

Les héritiers ou donataires se substituent au contribuable dans les avantages et obligations de la mesure (art. 269, §2, al. 5 CIR 92).

Distribution de réserves de liquidation. Les petites sociétés (au sens de l’art. 1 :24, §1-6 CSA) ont la possibilité de comptabiliser (une partie de) leur résultat comptable après impôt dans une « réserve de liquidation » (art. 184quater CIR 92). Elles paient sur cette réserve, en plus de l’impôt des sociétés ordinaire (mais avec cet impôt), une cotisation spéciale de 10 %.

En cas de distribution de cette réserve de liquidation dans les cinq ans à dater du dernier jour de l’exercice comptable durant lequel elle a été constituée, elles doivent encore retenir un précompte mobilier de 20 %. Si elles distribuent cette réserve après le délai de cinq ans, le précompte mobilier à retenir ne sera alors que de 5 %. Étant donné que le précompte mobilier est calculé sur la réserve de liquidation nette (après application de la cotisation spéciale de 10 %), la charge fiscale totale sur une distribution dans le délai de cinq ans sera de 27,27 %, et de 13,64 % après l’expiration de ce délai.

Les réserves de liquidation qui sont attribuées ou mises en paiement depuis le 29 juillet 2025 peuvent être distribuées avec un précompte mobilier de 6,5 % dès que trois ans se sont écoulés depuis la date de clôture du bilan de l’exercice de constitution (Loi-programme du 18.07.2025, MB 29.07.2025). Pour les réserves de liquidation constituées à partir du 1er janvier 2026, le taux de 6,5 % pour une réserve de liquidation d’au moins trois ans remplacera le taux de 5 % pour les réserves de liquidation d’au moins cinq ans, et le taux réduit pour une distribution anticipée sera supprimé. Les réserves de liquidation constituées à partir du 1er janvier 2026 pourront donc être distribuées après trois ans avec un taux de 6,5 %, et un taux de 30 % sera dû en cas de distribution anticipée. L’imposition totale sur la distribution, c’est-à-dire en incluant la cotisation spéciale de 10 % lors de la constitution de la réserve de liquidation, s’élèvera alors à 15 % ou à 36,36 %.

Sanction. Si votre société n’a pas retenu ou pas assez retenu de précompte mobilier, le fisc « brutera » le dividende. Autrement dit, il supposera que votre société a pris le précompte mobilier à sa charge et qu’en fait, le dividende brut que vous avez perçu était un dividende net.

Exemple

Votre société distribue un dividende de 1 000 € brut. En principe, elle doit en retenir 30 % de précompte mobilier:

 

Dividende brut

 1 000 €

Précompte mobilier à retenir : 30 %

 300 € (1 000 € × 30 %)

Dividende net à verser

 700 € (1 000 € – 300 €)

 

 

 

 

Si votre société n’a pas retenu ce précompte mobilier, et donc qu’elle vous a versé un dividende de 1 000 € net, le fisc brutera ce montant afin de calculer le précompte mobilier qui reste malgré tout dû.

Autrement dit, il supposera que ce dividende de 1 000 € est un dividende net et donc un montant brut moins 30 % de précompte mobilier. Pour parvenir au montant brut correspondant, il prendra « le montant net × 100/70 » étant donné que le taux du précompte mobilier est ici de 30 %. Le résultat sera donc le suivant : 1 000 € × 100/70 = 1 428,57 €.

Autrement dit, si le dividende de 1 000 € n’est pas distribué brut, mais net, le fisc fera comme si le dividende brut n’était pas de 1 000 €, mais bien de 1 428,57 €, de sorte que le précompte mobilier dont votre société doit encore s’acquitter s’élève à 428,57 €.

De façon schématique, la situation se présente donc comme suit :

 

Dividende brut

 1 428,57 

Précompte mobilier à retenir : 30 %

 428,57  (1 428,57  × 30 %)

Dividende net à verser

 1 000  (1 428,57  – 428,57 )

 

 

 

 

3.  Conséquences pour vous-même, personne physique

3.1.                   Un dividende est-il imposé en personne physique ?

Oui. Un dividende est un « revenu mobilier », qui est en principe imposable (art. 17, §1, 1° CIR 92). Le taux d’imposition est en principe de 30 % (art. 269, §1, 1° CIR 92), mais des taux réduits de 20 % ou 15 % sont possibles pour les dividendes VVPR-bis (art. 269, §2 CIR 92) et de 30 %, 20 %, 6,5 % ou 5 % pour les distributions de réserves de liquidation(art. 269, §1, 8° CIR 92).

Exonération partielle. En première instance, le précompte mobilier applicable doit toujours être retenu sur une distribution de dividende jusqu’à 859 € (année de revenus 2025). Vous pourrez cependant récupérer cette somme par la suite, via votre déclaration personnelle, et ce jusqu’à concurrence de 257,70 € (859 € × 30 % de précompte mobilier au taux le plus élevé). Cette exonération ne vaut pas seulement pour les dividendes de votre société, mais aussi pour ceux de toutes les sociétés, qu’elles soient ou non cotées en bourse, et qu’elles soient établies en Belgique ou à l’étranger. Seuls les dividendes d’organismes de placement collectif et ceux qui sont distribués ou obtenus par l’intermédiaire de « constructions juridiques » ou de fonds communs de placement en sont exclus (art. 21, al. 1, 14° CIR 92).

3.2.                   Comment un dividende est-il imposé en personne physique ?

Précompte mobilier. Comme nous l’avons vu, votre société doit retenir le précompte mobilier sur le dividende versé. Vous touchez donc directement un revenu net.

Encore à déclarer ? Normalement non. En effet, le précompte mobilier a un caractère « libératoire ». Cela signifie qu’il correspond à l’impôt définitif pour le revenu mobilier sur lequel il a été prélevé, et que ce dernier ne doit donc plus être mentionné dans votre déclaration IPP. Par conséquent, vous ne devez plus déclarer le dividende que si la société a par erreur oublié de retenir le précompte mobilier, ou s’il s’agit d’un dividende susceptible de bénéficier de l’exonération et donc demander le remboursement du précompte mobilier retenu.

Des frais déductibles ? Non. Vous ne pouvez plus déduire de frais forfaitaires ou réels sur les dividendes perçus. En pratique, cependant, il n’y aurait guère de frais à déduire des intérêts, de sorte qu’on ne peut pas vraiment considérer ceci comme un inconvénient.

Pas d’impôts communaux. Le précompte mobilier doit pas être majoré des centimes additionnels communaux.

Pas de majoration des versements anticipés. Sur vos dividendes, vous ne devez pas payer de majoration (« amende  ») pour versements anticipés insuffisants, car les intérêts sont des revenus mobiliers, et la majoration ne concerne que les revenus professionnels (rémunérations, avantages de toute nature, etc.).

Pas de cotisations sociales. Étant donné que les dividendes sont des « revenus mobiliers », ceux-ci ne sont pas non plus soumis aux cotisations sociales, qui ne sont calculées que sur vos revenus professionnels.

4.  Conséquences sur le plan de la TVA

4.1.                   Néant

La distribution d’un dividende par votre société n’a pas la moindre répercussion sur le plan de la TVA. Le fait que vous perceviez un dividende en votre qualité d’actionnaire n’entraîne donc pas votre assujettissement personnel à la TVA et ne vous oblige pas à facturer ce dividende à votre société.

Un dividende n’est donc en rien soumis à la TVA et voilà pourquoi il n’existe en principe pas de formalités spécifiques à accomplir lors de sa distribution (art. 44, §3, 10° CTVA).

5.  Exemple

Illustrons à nouveau par un exemple chiffré (applicable pour l’année de revenus 2025) les différentes conséquences fiscales, de la distribution d’un dividende par votre société.

Nous commençons tout d’abord par voir quel est en fait le coût « net » de la distribution d’un dividende pour votre société – compte tenu du fait qu’elle ne peut pas le déduire à titre de frais professionnels – et calculons ensuite le montant net (c.-à-d. après la déduction des impôts, des cotisations sociales, etc.) que vous en conservez en personne physique.

Nous sommes partis des postulats suivants :

Montant total du dividende distribué

12 000,00 €

Taux du précompte mobilier

 30 %

Taux de l’impôt des sociétés

 20 %

 

Conséquences pour votre société

Bénéfice imposable avant la distribution du dividende

15 000,00 

 

 

Dividende brut distribué par votre société

- 12 000,00 

 

 

Solde imposable dans votre société

(le bénéfice avant la distribution du dividende, un dividende n’est en effet pas déductible)

15 000,00 

 

 

Impôt des sociétés

- 3 000,00

 

 

Solde disponible dans la société

(bénéfice moins dividende moins impôt dû)

 

 

Coût net pour votre société

 

15 000,00

100 % 

 

Conséquences pour vous-même, personne physique

Dividende brut

 

12 000,00

100 % 

Précompte mobilier retenu par votre société (30 %)

(dividende brut × 30 %)

- 3 600,00

 

30 %

Dividende net perçu

(dividende brut moins le précompte mobilier)

8 400,00

 

 

Cotisations sociales

 

Non applicable 

Additionnels communaux

 

Non applicable

Majoration («  amende ») pour versements anticipés insuffisants

 

Non applicable

Votre net disponible en personne physique

 

8 400,00

70 %

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

6.  Le pour, le contre

6.1.                   Avantages d’un « dividende »

1.      Imposition avantageuse en personne physique. Sur un dividende, vous ne payez en tant que personne physique que de 30 % ou 15 % (20 %) de précompte mobilier ou, si les dividendes proviennent d’une réserve de liquidation, 20 %, 6,50 % ou 5 %. Au moment de la constitution de la réserve, la société doit, en outre, payer une cotisation spéciale de 10 %, ce qui porte à 27,27 %, 15 % ou 13,64 % la charge fiscale totale. Ce précompte mobilier, que votre société doit retenir et verser au receveur des contributions, est libératoire. Elle vous verse donc directement le montant net de ce dividende, après la retenue du Pr M. Les dividendes sont, de plus, exonérés de précompte mobilier jusqu’à 859 € (année de revenus 2025).

2.      Peu de formalités. La distribution d’un dividende s’effectue sur simple décision de l’assemblée générale des actionnaires. Nul besoin donc d’aller p.ex. chez un notaire.

3.      Pas de cotisations sociales. Sur le plan fiscal, un dividende est un « revenu mobilier » et donc pas un revenu professionnel. Il s’ensuit qu’il n’est pas soumis aux cotisations sociales ou à la majoration pour insuffisance de versements anticipés.

4.      À peu près toujours possible. Toute société, y compris celle qui n’a qu’un seul actionnaire, peut distribuer un dividende, pour autant qu’elle ait réalisé du bénéfice. Elle ne doit toutefois pas avoir réalisé ce bénéfice au cours de l’exercice où elle distribue le dividende : ce dividende peut tout aussi bien provenir d’un bénéfice réalisé au cours d’un exercice comptable antérieur.

5.      Pas d’impôts communaux ni de majoration pour versements anticipés insuffisants. Vous ne devez pas vous acquitter des additionnels communaux, et vous n’avez pas non plus à craindre la majoration pour insuffisance de versements anticipés.

6.2.                   Inconvénients d’un « dividende »

1.      Non déductible. Votre société ne peut pas déduire un dividende qu’elle distribue, qu’il provienne de l’exercice comptable en cours ou d’un exercice comptable antérieur. Dans ce dernier cas, toutefois, elle a déjà acquitté l’impôt des sociétés sur le dividende au cours de l’exercice comptable antérieur.

2.      Caractère collectif. En principe, une société doit toujours distribuer un dividende à tous ses actionnaires, en principe en proportion de leurs apports au capital ou aux fonds propres de la société. Il est possible d’accorder un dividende relativement plus important à certaines actions, si cela est prévu dans les statuts, mais on ne peut pas accorder la totalité du dividende à un seul actionnaire. Ce caractère collectif ne cesse d’être un obstacle que si vous êtes le seul actionnaire de la société.

3.      Uniquement pour les actionnaires. Une société ne peut distribuer un dividende qu’à ses actionnaires ou ses associés. Si vous êtes le gérant ou l’administrateur d’une société dont vous ne possédez pas d’actions, vous ne pouvez donc pas percevoir de dividende.

4.      Limite du droit des sociétés. En vue de protéger e.a. les créanciers, le versement d’un dividende n’est permis qu’après un test de l’actif net (ou test du bilan) ainsi, dans les SRL, qu’après un test de liquidité.

5.      Pas de précompte mobilier si vous attendez jusqu’à la liquidation. Lorsque vous ne distribuez pas vos bénéfices sous forme de dividendes, mais que vous les comptabilisez dans les réserves de liquidation, puis que vous attendez la liquidation de la société pour distribuer ces réserves, il n’y a plus aucun précompte mobilier à retenir. Il coûte donc plus cher de distribuer des bénéfices en tant que dividendes durant la vie de la société, plutôt que d’attendre la fin de la société pour les distribuer en tant que « boni de liquidation ».